• Post published:20 octobre 2015

madeleine penitenteMarie Madeleine dit aussi « Magdala » qui vient du mots gadol qui dans le contexte hébraïque signifie « de la tour » étonnant non ?

Marie madeleine lance son regard au delà du miroir, au delà de la composition. Elle passe au delà de la réalité ancienne révélée par le miroir, au delà aussi de l’objet de vanité, éclairé par le chandelier, mais ce miroir reste là, exactement face à nous et nous interpelle aussi.
Auprès de ce luxueux miroir, d’autres objets témoignent encore du passé rejeté. Les perles et boucles d’oreilles que Madeleine a posées devant elle ne sont pas d banales parures. Leurs présence n’est pas fortuite, elles marquent sans doute une fatalité, un signe du destin. Maintenant, les voici offertes à la contemplation aveugle d’orbites vides.
Le vrai chandelier, la vrai bougie sont naturellement en noir, représentés en contre jour. Le faux chandelier, la fausse bougie, ceux du reflet sont beaucoup plus visibles, plus perceptibles, parfaitement situés et représentés. Autrement dit, la réalité est moins consistante que l’illusion, que son reflet !
A ce dialogue étonnant du double irréel plus réel que la vraie bougie répond un autre duo, celui de Madeleine et du crâne. Également mis en évidence par la lumière de la flamme, ils proposent aussi une alternative poignante. Mais il semble que Madeleine ait choisi sa solution. Non seulement son regard est relevé au dessus de la flamme, du gouffre noir du miroir, mais Georges De La Tour la situe aussi en retrait, poussée à gauche de la composition, presque totalement installée derrière la diagonale que dessinent son bras et sa jambe, comme une frontière entre deux mondes. Madeleine est en train de se redressée, au terme du moment pathétique du choix entre deux vies : le vrai chandelier, la réalité, représentée en ombre obscure ou celle qui a pris sa place dans le miroir, plus vivante et plus vrai que la première.

madeleine penitente 2Une intense flamme, une figure de profil, un crâne de face, deux gros livres et une disciple. Tout ceci est en quelque sorte intégré dans un cercle, une boucle, un circuit fermé. Toute la méditation de Madeleine est engagée dans cet espace, sorti de la pénombre par la lumière de la flamme.
La composition est ainsi clairement articulée autour de la flamme. Le doute, pourtant, l’hésitation qui pouvaient encore habiter Madeleine sont peut-être lisibles dans la discrète diagonale bras-jambe qui la tient quelque peu en retrait. Mais sur cette diagonale, le bras conduit sans détour la réflexion d’une tête à l’autre. Le détour est dessiné par l’autre bras et le jeu de ce double cheminement, comme dans les caresses des deux mains, sur les deux têtes.
Madeleine a renoncé au luxe, à la vanité, à la séduction. Une sobre veilleuse, une discipline pour redire les souffrances du crucifié, les écrits des prophètes…et la crâne, tourné vers nous pour nous interpeller toujours.  

madeleine penitente 3C’est étonnant ! IL n’y a rien dans ce tableau. La moitié inférieure est noire, de sombre peinture au bitume. Juste dans le haut, un peu du visage d’une femme. Elle effleure un crâne.
Et pourtant ! Le crâne sombre en contre-jour, semble se prolonger dans les doigts. Son opacité s’infiltre, s’insinue, dans les doigts, la main, le bras et semble gagner la Madeleine. L’inerte humilité du crâne envahit la Madeleine.
La seule chose qui reste vivante, c’est le fragment du visage, avec l’oeil, posé sur la source de lumière. Madeleine est totalement abîmée dans sa réflexion. Et cette réflexion est aussi comme tactile. Le regard est figé, immobile, et la main caresse, explore le crâne, sonde la mort. Les doigts, comme des antennes attentives captent le mystère de l’au-delà. Pendant que le toucher, le sens de la matière explore la mort, le sens spirituel, le regard, interroge ce qui est caché, la flamme, symbole de révélation.
La flamme cachée, la lumière, la révélation, est opposée au crâne sombre, matière inerte, et Madeleine s’interroge, appuyée sur son coude, pauvrement éclairée dans cette grande pénombre.
Le miroir, en face d’elle nous renvoie l’interrogation. Il nous propose aussi la méditation en opposant l’image du crâne au visage de Marie Madeleine. La profondeur du tableau est fermée par le crâne et le bras. La mort arrête notre curiosité et dissimule la lumière. Perpendiculairement à cet axe frontal d’entrée dans le tableau, un autre alignement met en lumière, face à face, Madeleine et le reflet étrange du crâne. 
d’après Jacques-Edouard Berger 

marie madeleine 4
Tout est maintenant aligné la flamme, le crâne et Marie Madeleine. La réalisation semble plus enfantine, comme si Madeleine avait intégré son âme d’enfant, son enfant intérieur. D’ailleurs c’est un crâne d’enfant qui est représenté. Par l’intermédiaire de la flamme, de la connaissance, de la lumière intérieure, le corps et l’âme peuvent se contempler face à face avec tendresse, droit dans les yeux, en pleine conscience.
Des quatre tableaux c’est le seul où l’on voit une fumée monter de la flamme, la résurrection de l’être est achevée, l’âme peut s’élever.
Le miroir est posé à plat, le reflet renvoyé par le monde n’est plus nécessaire. Il reflète maintenant le ciel, il sert de lien entre le ciel et la terre. c’est la polarité ciel /terre réunie. 
Madeleine a trouvé son centre, son unité, elle peut se tenir debout !
La flamme qui éclaire en transparence les pages du livre de la vie, ou des connaissances anciennes, est située à gauche du coté de l’intuition, tandis que le coté droit symbole de l’avenir, de l’action, reste dans l’ombre. La partie éclairée de son être occupe l’axe central de la composition. Madeleine est dans son présent, sereine, entière. Le vêtement à disparu, devenu superflu, elle peut se montrer telle qu’elle est, sans artifices ni faux semblants. Une page du livre se tourne, l’union du corps, de l’esprit et de l’âme se lit dans le geste doux des bras et des mains, dans un tendre face à face.
C »est la polarité féminin /masculin qui unie les deux visages.
Aimer l’autre et s’aimer soi même, dans la douceur et la simplicité. 
Pascale